Pour sa quatrième édition du Forum de la prévoyance, Retraites Populaires s’est intéressée aux enjeux du 4e âge. Logements adaptés ou solutions de prévoyance figurent parmi les réflexions afin de satisfaire aux besoins de cette population.
D’ici à 2040, les seniors (personnes âgées de 65 ans et plus) représenteront plus de 20% de la population totale (contre 16.5% en 2020 ou 18.7% en 2030). Ce vieillissement de la population entraîne une nouvelle étape de vie : le quatrième âge. Il est désormais possible de coexister entre quatre générations, puisque le nombre de centenaires a ainsi presque doublé entre 2000 et 2017, selon l’Office fédéral de la statistique. De 2000 à 2020, les 99 ans et plus sont passés de 1'545 à 3’070. Si l’allongement de l’espérance de vie est une bonne nouvelle, le 4e âge accentue toutefois une pression déjà forte sur le système de prévoyance suisse et entraîne de nombreuses questions en matière de logement, prestations de santé et prévoyance.
Des centenaires autonomes
C’est autour de ces interrogations que s’est organisée la quatrième édition du Forum de la prévoyance, à Cinétoile Malley-Lumières. Devant un parterre de 130 invités, Philippe Doffey, directeur de Retraites Populaires, a ouvert la manifestation avec ce proverbe chinois : « Tout l’enjeu consiste à ajouter de la vie aux années, et pas l’inverse. ».
De manière générale, les personnes âgées souhaitent vieillir « chez elles ». Malgré l’idée reçue, la majorité des femmes et des hommes vaudois ne vivent pas en établissement médico-sociaux (EMS) à l’âge de 95 ans mais chez eux, selon le Professeur Christophe Büla, chef du Service de gériatrie et de réadaptation gériatrique au CHUV.
Rester à la maison est possible, puisque les femmes centenaires actuelles, par exemple, ont un statut fonctionnel significativement meilleur que celles d’il y a 20 ans. « A part la toilette ou le fait de s’habiller, la majorité des centenaires est indépendante dans leurs activités de la vie quotidienne de base », précise le professeur. Cette autonomie physique est toutefois intimement liée aux liens sociaux de la personne. « Plus une personne âgée se sent seule, plus le déclin fonctionnel moteur sera accéléré. » C’est pourquoi, le chef du Service de gériatrie et de réadaptation gériatrique au CHUV a prodigué quelques conseils afin de « bien vieillir » : une activité physique hebdomadaire d’une demi-heure environ, une bonne alimentation (en adoptant une diète dite méditerranéenne) et surtout un maintien des relations sociales.
Une évolution des logements nécessaires
Si le fait de « vieillir chez soi » rencontre un large consensus, la réalité de l’immobilier est toute autre. Selon Tristan Gratier, directeur de Pro Senectute Vaud, les logements sont actuellement inadaptés. Jugés trop grands, accidentogènes, mal situés et parfois trop chers, ils augmentent les risques de chute, d’épuisement et de malnutrition, voire d’isolement. Pour inverser la tendance, Tristan Gratier milite pour une mixité générationnelle et sociale dans les villes et villages ainsi que dans les quartiers.
A ceci s’ajoute également la question du financement. En effet, les jeunes retraités sont souvent confrontés à un dilemme : faut-il profiter de la vie pendant qu’on peut encore quitte à tout dépenser, ou investir dans une fin de vie « chez soi » conforme à ses attentes ? D’autant plus que de nombreux seniors, surtout dans la période charnière « 60-80 ans » ne disposent plus des moyens financiers de leur vie active.
Une politique vaudoise socio-sanitaire
Face à cette problématique, les interlocuteurs dessinent des solutions différentes. Du côté du canton de Vaud, la Conseillère d’Etat Rebecca Ruiz, souhaite mettre en place son programme « Vieillir 2030 ». Lancé en 2021, ce projet regroupe 130 personnes dont des représentants de communes, d’organismes des seniors, d’institutions paraétatiques et privées. L’objectif est de développer des mesures spécifiques pour tenir compte des besoins des groupes vulnérables, de maintenir le bien-être général des seniors et lutter contre les inégalités sociales. Une des mesures concrètes est de retarder l’entrée en EMS d’une année ou deux en diversifiant l’offre de logements adaptés. « Les seniors du canton de Vaud bénéficieront de conditions favorables qui leur permettront de vivre et vieillir au sein d’une société bienveillante », résume Rebecca Ruiz. L’institution Pro Senectute vise la modernisation de 40'000 logements. Parmi les projets de construction figure notamment les futures habitations aux Plaines-du-Loup. Dans ce futur éco-quartier du Nord de Lausanne, les liens sociétaux et la mixité générationnelle seront renforcées.
Autre solution : créer de nouveaux produits d’assurance. En effet, de nombreux pays développés proposent des solutions de financement couvrant la perte d’autonomie au grand âge. En Suisse, l’offre d’assurance n’est que marginale, comme l’a rappelé Michel Fuino, actuaire de Retraites Populaires. Pourtant, une prise en charge complète des coûts par l’État ne se fait qu’à condition d’avoir épuisé sa fortune personnelle. Dans ce contexte, l’assurance offre en premier lieu la garantie de disposer des ressources financières nécessaires en cas de perte d’autonomie. C’est pourquoi Retraites Populaires planche sur des solutions adaptées en matière de prêts hypothécaires pour optimiser le bien immobilier par exemple. La mise à disposition d’un service d’assistant/e de vie financé, par exemple avec une rente viagère en collaboration avec des partenaires reconnus, se dessine comme une solution envisageable.