Pour la cinquième édition du Forum, Retraites Populaires et Pro Senectute Vaud se sont intéressées à la problématique du logement des seniors.
Au programme, la nécessité de proposer des logements adaptés pour les personnes âgées, de créer du lien social avec une référente ou avec le voisinage, afin qu’ils puissent rester le plus longtemps possible chez eux, se sentir en sécurité et s’y sentir bien. Une réflexion profonde sur l’habitat de demain est nécessaire et d’actualité.
D’ici 2030, environ un cinquième de la population aura 65 ans et plus, contre 16% actuellement. L’allongement de l’espérance de vie a non seulement un impact notable sur le système suisse de prévoyance, il entraîne également de nombreuses questions en matière de logement.
Cette thématique a animé la cinquième édition du Forum organisé par Retraites Populaires et Pro Senectute Vaud. Devant un parterre de 200 convives, à l’Auditoire Paternot de la Fondation ISREC, les interventions se sont succédé afin de présenter des solutions pour que les seniors puissent vivre et vieillir chez eux, en sécurité, selon leur souhait.
Entre logements et animation socio-culturelle
Du côté du canton de Vaud, la Conseillère d’Etat Rebecca Ruiz, en charge du Département de la santé et de l'action sociale (DSAS), a défini les contours du programme «Vieillir 2030». Ce dernier, démarré en 2021, concrétise des mesures spécifiques pour tenir compte des besoins des seniors, maintenir leur bien-être général et lutter contre les inégalités sociales. Parmi les objectifs figure notamment la volonté de retarder l’entrée dans les établissements médico-sociaux (EMS) de 1 à 2 ans en diversifiant l’offre de logements autonomes et en élargissant les prestations de soins et d’aide à domicile.
Preuve en est avec notamment le soutien au projet «Elderli», la colocation intergénérationnelle. Les seniors peuvent sous-louer une partie de leur logement à des étudiant.e.s. Ensuite, les binômes sont accompagnés par des travailleuses sociales et travailleurs sociaux. Un autre projet présenté concerne la documentation et la promotion du travail d’animation socioculturelle en logement adapté avec accompagnement (LADA). A ce titre, la Commune d'Epalinges, via le Centre d'animation socioculturelle Palinzard, réalisera un référentiel d’intervention en détaillant les pratiques d’animation dans ce domaine. «Celui-ci pourra, à la fois, promouvoir ces mesures auprès des seniors et être source d'inspiration pour d'autres logements adaptés avec accompagnement dans le canton de Vaud», précise Rebecca Ruiz.
Recréer du lien et des interventions
En marge du projet cantonal, Retraites Populaires a développé son programme «Bien vivre sa retraite» afin d’accompagner l’évolution démographique. Dès lors, l’institution a présenté ses actions dans le domaine de l’immobilier et du logement.
Ainsi, Retraites Populaires et ses mandants comme la Caisse de pensions de l’Etat de Vaud (CPEV) et la Caisse intercommunale de pensions (CIP) ont réalisé de nouveaux logements adaptés aux seniors: La Corsaz à Montreux, Métamorphose à Lausanne et les Coteaux de la Venoge à Echandens. Autre axe de travail: le bâti existant. Afin de favoriser le vieillissement à domicile, Retraites Populaires et ses mandants mènent des interventions auprès du parc immobilier existant pour permettre à leurs locataires de rester chez eux le plus longtemps possible: installation d’une porte sur la baignoire ou de barres d’appui dans les salles de bain, notamment. «Nous visons la suppression des barrières architecturales comme la création ou renouvellement d’ascenseur, explique Sébastien Henchoz. En complément à ces transformations, il est nécessaire aussi de créer un espace de rencontre multigénérationnel et de renforcer les liens entre les locataires. Les concierges représentent également un élément important dans l’accompagnement des locataires âgés au quotidien. Bien vivre sa retraite c’est aussi vivre à domicile, en sécurité et avec le sentiment d’être accompagné.»
«Recréer du lien»
Pour ce dernier élément, Retraites Populaires et ses mandants ont établi un partenariat étroit avec Pro Senectute Vaud. «En effet, parmi les effets négatifs du vieillissement figure notamment l’isolement. La personne souffre, demande de l’aide, mais refuse les solutions proposées», précise Marc Favez, Responsable Habitat et travail social communautaire, Pro Senectute Vaud au sein de l’organisme.
Face à ce constat, Pro Senectute Vaud agit directement sur l’environnement social, soit en développant les interactions sociales notamment avec le voisinage, soit à l’aide de référents sociaux. De plus, ces échanges permettent aux locataires de réinstaurer des liens sociaux entre eux et de vivre en sécurité. Ainsi, dans un projet pilote à Gland, avec le soutien de la Ville, Retraites Populaires et Pro Senectute Vaud ont agi directement sur un patrimoine de 500 logements en apportant des modifications dans les appartements ou en renforçant les liens avec une référente sociale itinérante. «L’adaptation des logements individuelle favorise un maintien à domicile dans un contexte connu et sécurisant», résume Sivia Rei, chargée de projet communautaire au sein de Pro Senectute Vaud.
Repenser l’immobilier
Pour Laura Mechkat, architecte et membre de l’association «Habitat 4 Générations», l’évolution démographique marque le passage d’une société de trois générations à une société de quatre générations dont deux à la retraite. «Entre les évolutions des modes et du rythme de vie, les crises énergétique et sanitaire, sans oublier le dérèglement climatique, il est nécessaire de mener une requalification de l’habitat à l’échelle de la ville, du quartier et du logement.»
Pour répondre à ces nouveaux enjeux sociétaux, Laura Mechkat met en avant la nécessité d’imaginer un habitat de demain plus inclusif et agile qui favorise non seulement les solidarités mais procure un sentiment de bien-être et de sécurité. «Ainsi, un habitat résilient est un habitat capable de s'adapter aux grandes mutations en cours; il n'impose pas un mode de vie à ses habitants, il est appropriable et permet la mutualisation de certains espaces», précise l’architecte. Par exemple, elle met en avant des constructions avec des parois modulables permettant aux habitants de choisir l'affectation des pièces et de modifier les relations entre les pièces ou leur taille. «L’habitat doit offrir les conditions propices au développement des échanges et de la solidarité, ainsi qu'à la création de liens entre générations. Sans oublier les concierges qui sont garants du lien social.»
En dernière partie d’événement, un débat mené par Mélanie Freymond a réuni tous les intervenants ainsi qu’Isabelle Monney, Municipale à la ville de Gland. L’occasion de rappeler les actions menées dans le canton de Vaud au service des seniors et la nécessité d’une vision à long terme dans le domaine du logement. «Le temps dans la construction est différent, précise Sébastien Henchoz. Entre les prémices du projet et sa réalisation, une dizaine d’années s’écoulent. C’est pourquoi il faut avoir une vision et se montrer pionnier.»